"L’on dit que dans l’obscurité nulle lumière ne s’écrit, je suis né le regard abyssal d’un noir sans fond. Et pourtant, lorsque mes yeux croisent les vôtre, je vois palpiter tout l’amour que je peux encore vous offrir si seulement vous me tendiez vos bras. Ici, le temps ne danse que sur de vagues souvenirs, usés d’en avoir dévoré chaque mot. Je tairai les aubes et les crépuscules, les nuits sombres sans repos. Ici tout me semble être une toile sans couleurs, sans histoire, sans image, sans sourire, sans fin, sans aucune soif de vivre, ici tout est désolation. La paume de mon cœur se promène froide entre quatre murs qui ne recueillent plus mes tristes confidences, j’ai fini par comprendre qu’il ne me répondrait jamais. Depuis votre écran, alors que j’entends le parfum odorant d’un repas qui se réveille, moi, le ventre rassasié de tous ces kilos que la faim me vole, je me rapproche peu à peu d’une fin sans suite. Je le sais, je dois continuer à m’endormir dans les draps autrefois épais de l’espoir, me dire que tout est possible à celui qui croit et qu’un jour j’épouserai alors de nouveau les tendres bras d’une âme humaine. Je les ai tant rêvés, tant attendus, tant espérés de toute ma force, de tout mon cœur, ils étaient là, si proches de moi, tant je les avais dans l’esprit. Mais voilà, aujourd'hui c’est mon anniversaire, j’ai seize années de poils et même lui à présent me trahit, hirsute, il ne me brosse plus dans le bon sens pour charmer un tant soit peu, une main compatissante. Je ne suis plus très beau, c'est un fait, et quelle tristesse de savoir que je ne peux vous dévoiler l'éclat de mon cœur, vêtu de lumière. Si seulement vous pouviez le percevoir, vous seriez illuminé pour l'éternité. Laissez-moi vous aimer, laissez-moi vous dire les mots bleus, laissez-moi guérir les vôtres."
David Banville
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